Crise : Plusieurs organisations minimisent la visite du secrétaire général de l’Onu Antonio Guterres en Haïti

Écrit par Alter Presse, Haïti, publié le 1er juillet 2023 

Le peuple haïtien ne peut rien espérer de la visite en Haïti, le samedi 1er juillet 2023, du secrétaire général de l’Organisation des Nations unies (Onu), le Portugais Antonio Guterres, estime le regrou-pement Konbit òganizasyon politik, sendikal ak popilè yo (Konbit) [1], le vendredi 30 juin 2023, en conférence de presse, à laquelle a assisté l’agence en ligne AlterPresse. 

La visite du chef de l’Onu viserait à consolider l’idée d’une intervention militaire, assurer le renou-vellement du mandat du Bureau ingéré des Nations unies en Haïti (Binuh) et maintenir au pouvoir le premier ministre de facto Ariel Henry, dénonce le syndicaliste Josué Mérilien du Konbit et également coordonnateur de l’Union nationale des normaliennes et normaliens d’Haïti (Unnoh). 

« Je suis à Port-au-Prince pour exprimer ma solidarité au peuple haïtien et faire appel à la communauté internationale pour quelle continue à appuyer Haïti, y compris avec une force internationale qui puisse soutenir la police nationale.Ce n’est pas le moment d’oublier Haïti », a tweeté Antonio Guterres. 

Les positions défendues par les actrices et acteurs du système des Nations unies ne sont pas celles du peuple haïtiens, critique le regroupement Konbit. 

Le secrétaire général de l’Onu ne ferait que « jouer le rôle de caisse de résonance des pays membres du Core group », entité composée des ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de la France, de l’Union européenne (Ue), ainsi que de la représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies et du représentant spécial de l’Organisation des Etats américains (Oea), considère Konbit. 

« Le peuple haïtien n’a pas besoin d’occupation, mais plutôt de solutions durables à la crise de criminalité. Il nous faut de l’accompagnement pertinent ». 

Le regroupement Konbit dénonce des manoeuvres du gouvernement de facto pour casser l’élan du peuple haïtien, exprimé à travers le mouvement de résistance populaire Bwa kale enclenché contre les bandits armés depuis le lundi 24 avril 2023, à Canapé Vert, où 14 présumés bandits ont été lynchés. Ces derniers étaient soupçonnés de venir en renfort à un groupe d’individus armés, qui tentaient d’installer leur base à Debussy, non loin de Turgeau. 

De telles manoeuvres favorisent un retour en force des gangs armés sur le territoire national, déplore-t-il. 

La solution au climat de terreur ne réside pas dans la présence d’une force d’occupation, mais dans la mobilisation populaire et le renforcement de la Police nationale d’Haïti (Pnh), en lui dotant des matériels nécessaires et de moyens lui permettant de s’attaquer aux malfrats qui sèment la terreur sur le territoire national. 

Il faut réorganiser et encadrer la lutte populaire, qui est le pilier de toutes solutions à la terreur des gangs armés, préconise le regroupement Konbit. 

Mettre fin à la tutelle onusienne en Haïti 

Tout en exprimant son pessimisme concernant les retombées de la visite du secrétaire général de l’Onu en faveur du peuple haïtiens, le regroupement Konbit òganizasyon politik, sendikal ak popilè yo tient, tout de même, à formuler certaines recommandations. 

Il appelle le secrétaire général de l’Onu à mettre fin à la tutelle onusienne, qui date de plus de 18 ans (depuis 2004) et qui contribuerait à plonger le pays dans la crise multidimensionnelle dans laquelle il se trouve. 

Il demande à Antonio Guterres de stopper cette tutelle s’il veut aider le peuple haïtien. 

Le regroupement Konbit suggère aux Nations unies d’oeuvrer pour la mise en application de leur résolution 2653, adoptée à l’unanimité le 21 octobre 2022 et demandant à tous les États membres des Nations unies de prendre toutes les dispositions nécessaires, pour imposer des interdictions de voyager par des sanctions aux personnes qui financent les crimes et la corruption en Haïti. 

Ces sanctions viseraient aussi à geler leurs avoirs et les restituer au peuple haïtien, ainsi qu’à mettre un embargo sur les armes en circulation illicite dans le pays. 

Cette résolution aurait été sabotée par le Canada et les États-Unis d’Amérique, contrairement aux prévisions de dispositions adoptées par les États membres de l’Onu lors du vote. 

Le regroupement Konbit òganizasyon politik, sendikal ak popilè yo appelle le secrétaire général de l’Onu à s’abstenir de supporter le premier ministre de facto, Ariel Henry qui, selon lui, fait partie du problème. 

Il plaide aussi pour une enquête indépendante, devant évaluer les dégâts des différentes missions de l’Onu au cours des dernières années et indemniser le peuple haïtien pour les souffrances endurées. 

L’Onu devrait aussi s’abstenir de développer un comportement de colons vis-à-vis d’Haïti, exige-t-il. 

« Tous les droits sont bafoues en Haïti », dixit l’expert indépendant de l’Onu William O’Neill 

La visite du secrétaire général de l’Organisation des Nations-unies, Antonio Guterres, survient trois jours après celle de l’expert indépendant des Nations unies des droits humains en Haïti, l’Américain William O’Neill. 

« Tous les droits sont bafoués en Haïti », a admis O’Neill , au terme de sa mission de 10 jours en Haïti, en conférence de presse, le mercredi 28 juin 2023. 

Comme d’autres responsables du système des Nations unies, l’expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits humains en Haïti, l’Américain William O’Neill, appelle à une intervention militaire dans le pays. 

Réticences quant à l’envoi d’une force internationale en Haïti 

Lors d’une conférence de presse conjointe avec le premier ministre de la Jamaïque, Andrew Holness, le 15 mai 2023, António Guterres a critiqué les réticences internationales pour l’envoi d’une force internationale en Haïti, évoquant les difficultés rencontrées pour mobiliser la volonté des pays, qui auraient les meilleures capacités à diriger une force internationale robuste en Haïti, visant à lutter contre la violence des gangs armés. 

Il avait toutefois, réitéré son appel à pouvoir disposer de la présence d’une force de police internationale robuste, pour réprimer les gangs armés dans le pays, dans le cadre de l’appui à la Police nationale d’Haïti (Pnh). 

Il faut, de toute urgence, déployer une force armée spécialisée internationale en Haïti, avait déclaré António Guterres, dans un rapport en date du 17 janvier 2023. 

Le 7 octobre 2022, le gouvernement de facto avait également sollicité, auprès des Nations unies, le déploiement d’urgence d’une force armée spécialisée internationale, pour aider la Pnh à lutter contre l’insécurité, liée aux actes criminels des bandes armées. 

Une demande d’intervention militaire, qualifiée « de crime et de trahison » par plusieurs organisations en Haïti. 

La demande d’intervention militaire étrangère en Haïti, formulée par le gouvernement de facto à l’endroit de la communauté internationale, ne fait pas l’unanimité en Haïti, comme au niveau de la communauté internationale. 

Le gouvernement du Canada s’est toujours opposé à cette idée, estimant qu’il revient aux Haïtiennes et Haïtiens de prendre le leadership de toute solution à la crise en Haïti. 

Par contre, les gouvernements de la Chine et de la Russie ont exprimé des réserves sur le déploiement d’une force internationale armée en Haïti 

Entre-temps, le premier ministre de facto Ariel Henry se dit optimiste quant à un éventuel soutien international pour combattre la criminalité en Haïti -. [ppsf emb rc apr 1er/07/2023 07:50] 

[1] Konbit òganizasyon politik, sendika ak popilè yo regroupe le Mouvement démocratique populaire (Modep), l’Union nationale des normaliennes et normaliens haïtiens (Unnoh), le Mouvement de liberté, d’égalité des Haïtiennes et Haïtiens pour la fraternité (Moleghaf), Fòs kanapevè reveye, Mouvman esklav revòlte, la Coordination nationale des ouvrières et ouvriers haïtiens (Cnoha), l’Association nationale des normaliennes et normaliens indépendants d’Haïti (Annih), entre autres